Houda-Imane Faraoun à la tête du MPTIC : plusieurs chantiers en perspective

Numéro dossier: 102

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 Interview avec Anis Souilah, gérant d’AZ Network

« La Ministre devrait libérer les initiatives. La liberté d’entreprendre fera le reste »

Anis Souilah est architecte de formation. Passionné par les nouvelles technologies, il a lancé en 2011 avec deux associés AZ Network, une entreprise spécialisée dans la réalisation du contenu digital, dont les applications mobiles, les jeux Facebook, les sites internet, etc.

Iman Houda Feraoun a un parcours très intéressant. En tant que jeune responsable d’une start-up, pensez-vous que la nomination de cette jeune femme soit réellement une chose positive pour son département et pour l’Algérie ?

La nouvelle Ministre est jeune, ce qui fait certes la différence avec ses prédécesseurs. Cela peut apporter un plus au ministère de la Poste et des TIC, mais c’est loin d’être suffisant. Sa valeur ajoutée dans un domaine comme celui des TIC devra être l’audace. La Ministre devra casser des tabous, rompre avec les vieux réflexes et avoir une vision différente de celle qu’avaient les précédents ministres des TIC en Algérie, et ainsi rattraper l’immense retard que nous accusons dans ce domaine, dans un premier temps par rapport à nos voisins magrébins, puis par rapport au reste du monde, et ce en élaborant une stratégie et une feuille de route à long terme. La nomination de M. Younes Grar comme chef de son cabinet est un très bon signe.

La nouvelle Ministre a du pain sur la planche. Que doivent être ses priorités selon vous ?

Libérer les initiatives. Il n’y a que de cette manière qu’on verra éclore une dynamique des TIC dans notre pays. Et je ne parle pas que de problèmes d’agréments, d’autorisations, de licences d’exploitations et autres entraves à l’émergence d’une économie numérique en Algérie. Il y a aussi la question des prix. Rien que l’ouverture d’un cybercafé est difficile en Algérie, non seulement parce que les entraves administratives sont énormes, mais aussi à cause des prix que pratique le provider public. Aussi, l’accès à la 3G reste relativement cher. Il n’est pas accessible à l’algérien moyen, alors qu’en Algérie les gens sont très friands de nouvelles technologies. Faciliter l’accessibilité à Internet créera une dynamique qui fera vite avancer le domaine des TIC. Quant au paiement en ligne, il est toujours bloqué et c’est administratif. On ne peut monnayer des services numériques, via le net ou via mobile, alors que techniquement cela est non seulement possible via ce que l’on appelle vulgairement le flexy. La Ministre devrait libérer les initiatives. La liberté d’entreprendre fera le reste.

Comment est-ce que la Ministre peut contribuer dans la relance des start-up en Algérie ?

Le ministère de la poste, seul, ne peut pas relancer les start-up en Algérie. Mais vous avez utilisé le bon terme «contribuer ». Il faut d’abord que les entreprises comme les particuliers puissent avoir les moyens de travailler, comme une connexion internet stable, et digne de ce nom. Il faut qu’ils aient le droit de choisir leur provider. Pouvoir disposer d’une ligne téléphonique fixe, et je vous jure que ce n’est pas le cas de tout le monde encore aujourd’hui. Il faut lever les entraves à la création d’entreprises, les agréments, les licences d’exploitations, les autorisations et ne restreindre cela qu’aux secteurs stratégiques. Ensuite, sur le volet commercial, les entreprises doivent pouvoir monnayer leurs services. Nous sommes l’un des rares pays au monde où on peut acheter en ligne mais à condition de payer de la main à la main ! Et ce n’est qu’un exemple. Enfin, d’autres institutions doivent apporter leur pierre à l’édifice. Le ministère du commerce pour alléger la création d’entreprises par exemple, ou celui de la communication en libérant les ondes pour faire bénéficier les start-up de radios libres par exemple. La Ministre doit œuvrer à l’établissement d’un écosystème, en ouvrant plus d’établissements à vocation TIC comme le cyberparc de Sidi Abdellah, mettre l’accent sur la formation, et surtout sur la recherche qui est complétement négligée. Aussi, en attribuant par exemple des aides au financement, propres aux start-up évoluant dans les TIC. Exemple : le Fonds d’appropriation des usages et du développement des technologies de l’information et de la communication, un fonds de 5 milliards de dinars pour le développement du secteur, reste figé. Pourquoi ?


Avant de passer à la 4G, ne pensez-vous pas que la priorité est d’améliorer le débit de l’ADSL ?

Demander à Algérie Télécom d’améliorer ses prestations est nécessaire mais pas suffisant. D’abord parce que l’entreprise publique ne peut pas tout faire à elle-seule. Plusieurs providers, consacrés actuellement aux professionnels, ont la capacité de faire des offres pour les particuliers, aux côtés des opérateurs de téléphonie. Il faut multiplier les offres, faire un mix privé/public avec des formules complémentaires entre 4G, ADSL haut débit, Msan et 3G selon les régions, les secteurs et leur rentabilité. Algérie Télécom ne peut pas équiper le pays d’Est en Ouest, et du Nord au Sud, avec la même qualité partout. Il n’y a que par les offres complémentaires que cela peut marcher.