TIC VS CHÔMAGE : l’autre match que doit gagner l'Algérie...

Numéro dossier: 82

Index de l'article

Le gouvernement affiche ses ambitions mais…

Bâtir une économie numérique en Algérie, c’est l’ambition aussi du gouvernement. Celui-ci, depuis quelques mois, ne semble pas insensible aux appels des experts et des entrepreneurs. Preuve en est, depuis la rentrée, un plan faramineux a été dessiné. En effet, le gouvernement algérien a décidé d’allouer une enveloppe de 140 milliards de dinars au Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication, devant être consacrée notamment au renforcement des capacités en matière des TIC, avait annoncé il y a de cela quelques temps l’ancien ministre en charge du secteur Moussa Benhamadi.

" Le gouvernement va accorder 140 milliards de dinars au ministère pour pouvoir réaliser des infrastructures, qui feront partie par la suite du patrimoine d’Algérie Télécom ", avait-il déclaré en marge de la signature d’un accord sur le référentiel emploi entre la direction d’Algérie Télécom et le syndicat d’entreprise.


Il avait expliqué, à cette occasion, que cet investissement allait servir à renforcer le réseau de la fibre optique en Algérie, d’adapter les infrastructures et de renforcer les capacités en matière de TIC jusqu’en 2015. Le Ministre avait rappelé, pour convaincre les plus sceptiques, que le gouvernement avait déjà accordé, dans le cadre du plan d’accompagnement d’Algérie Télécom, un prêt de 115 milliards de dinars sur 15 ans avec un taux d’intérêt de 3.5%.


Quant au développement d’Algérie Télécom, le gouvernement a assuré que cette entreprise avait commencé la mise en place de la LTE (Long Term Evolution), " qui est assimilée à la téléphonie de quatrième génération 4G pour le téléphone fixe, dans les régions enclavées, montagneuses et frontalières du pays ". Mais ce plan suffira-t-il pour remettre l’Algérie sur les rails du développement numérique ? Pas vraiment car l’ampleur du chantier à mener est immense.

Et pour cause, l’Algérie a reculé à la 131ème place dans le classement mondial 2013 des technologies de l’information et de la communication, après avoir occupé le 118ème rang en 2012, selon le dernier rapport du World Economic Forum. Sous le thème " Croissance et emploi dans un monde hyper-connecté ", ce rapport de plus de 400 pages a élaboré son classement en fonction de l’indice " Networked Readiness Index " (NRI) qui évalue la disponibilité de 144 pays à exploiter les TIC en termes notamment de croissance, de compétitivité ainsi que de la prospérité de leurs citoyens.

Il est à souligner que l’indice NRI calcule l’aptitude d’un pays à exploiter pleinement les TIC en termes respectivement d’infrastructures des TIC, du coût d’accès et de disponibilité des compétences requises pour un usage optimal, de l’utilisation des TIC par les gouvernements et le milieu des affaires, du contexte économique et du climat pour l’innovation, du cadre politique et réglementaire et de l’impact économique et social des TIC.

Pour chacun de ces paramètres, le rapport a également élaboré un classement pour l’ensemble des pays. Selon les auteurs de cette étude, le rapport démontre qu’un pays " qui tarde à mettre en place une vaste stratégie nationale pour le service à grand débit risque d’accuser un déficit de compétitivité mondiale et ne pourra pas récolter les avantages sociaux des TIC ".


Les TIC, poumon de la création d’emploi

De surcroît, ils relèvent que " les avantages des TIC sont, aujourd’hui, largement reconnus et représentent une méthode permettant aux entreprises et au secteur économique d’optimaliser la productivité, de libérer des ressources et d’encourager l’innovation et la création d’emploi ". Dans son commentaire pour chacun des pays évalués, le rapport souligne que pour ce qui concerne l’Algérie, " sa chute de 13 places, en une année, pour occuper le 131ème rang, montre qu’elle continue à afficher un faible effet de levier des TIC, avec l’un des impacts les plus faibles mondialement sur le plan économique (143ème place mondiale pour ce critère) et social (141ème) ".

Il souligne également qu’une " mauvaise infrastructure des TIC (119ème) combinée avec une faible base de compétences (101ème) se traduisent par des niveaux très faibles d’utilisation des TIC (140ème) ".

A cet effet, le rapport précise que l’Algérie se classe respectivement à la 100ème place sur la base du critère de l’usage individuel des TIC, à la 144ème place dans leur usage dans le domaine des affaires, et à la 139ème place dans leur utilisation dans la sphère institutionnelle et gouvernementale. En outre, il considère que " les graves déficiences dans le cadre réglementaire (141ème) et les insuffisances dans l’environnement des affaires et de l’innovation (143ème) entravent les capacités positives qui découlent des TIC ".

Par ailleurs, il est constaté qu’à l’échelle arabe, l’Algérie se classe à l’avant-dernière place suivie de la Libye. Les pays arabes les mieux classés et qui se trouvent au Top 30 à l’échelle mondiale sont le Qatar (23ème), les Emirats Arabes Unis (25ème) et le Bahreïn (29ème).



Les TIC promettent de nouvelles perspectives pour l’emploi

Les défis à relever pour l’Algérie sont donc énormes. Et les TIC se retrouvent au cœur de ses actions pour offrir de meilleures conditions de vie à ses citoyens. Une vie plus agréable qui passe incontestablement par des dignes de ce nom.  Et à ce titre, la Banque Mondiale a assuré que les TIC couvrent de nouvelles perspectives pour créer des emplois et remédier ainsi au chômage.

« Songez que, dans le domaine des applications pour téléphones portables, une entreprise qui fournit l’Apple Store par exemple accède ainsi aux plus de 500 millions de titulaires d’un compte », explique cette institution internationale dans une note de conjoncture. Dans ce sillage, elle n’omet pas de souligner que les TIC rapprochent les actifs des emplois.

« Les bourses du travail en ligne, qui mettent en relation candidats et employeurs du monde entier, aideraient près de 12 millions de personnes à se faire embaucher. Des sites comme Babajob en Inde, Duma et M-Kazi au Kenya ou Souktel au Moyen-Orient et en Afrique du Nord proposent des services de recherche d’emplois par Internet ou via les technologies mobiles. À l’instar de Souktel, qui cible les communautés à faible revenu, ils améliorent l’inclusion sur les marchés de l’emploi », argue encore la Banque Mondiale.

Pour sa part, Chris Vein, Responsable de l’innovation à la Banque Mondiale pour le développement des TIC dans le monde, va jusqu’à affirmer que « les nouveaux débouchés professionnels dans les TIC sont importants parce que tous les pays cherchent à créer davantage d’emplois de qualité avec des retombées économiques et sociales positives pour les travailleurs comme pour la collectivité ».  


A la Banque Mondiale, on est donc convaincu que les TIC vont faire reculer le chômage dans le monde et révolutionner les modes de production et de travail. Cette prise de conscience tarde, malheureusement, à voir le jour en Algérie. Et pourtant, dans de nombreux pays à travers le monde, les TIC ont été exploitées pour offrir du travail aux jeunes chômeurs. L’exemple des Tigres asiatiques est éloquent à ce sujet. La Malaisie, Taiwan, Thaïlande ou l’Indonésie ont une expérience à transmettre à l’Algérie dans ce domaine. Dans ces pays, naguère sous-développés, une véritable industrie s’est créée autour des TIC. Ce qui a permis à ces nations d’être propulsées dans la modernité. L’Algérie peut donc s’inspirer de ces exemples à condition qu’elle soit dépourvue d’une véritable vision de l’avenir et d’une sérieuse volonté de faire….