Nouvelles technologies : Un secteur dans un « Etat » d’hésitation

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M. Ali Kahlane, président de l’AAFSI

« Nous avançons à reculons »


Quel regard portez-vous aujourd’hui sur le programme E-Algérie ? Où en sont les choses exactement ?

Ce Plan avait toutes les chances de réussir et, les cinq années qui lui étaient prévues pour sa réalisation, étaient supposées rattraper notre retard. Mais il devait surtout nous permettre d’atteindre le point de non retour dans le déploiement des TIC, et accompagner ainsi le développement économique et social du pays. Malheureusement, trois années se sont écoulées après sa première mise en ligne sur le site web du MPTIC, rien de tout cela n’est arrivé. A mon avis, deux raisons sont à l’origine de «l’échec » de ce programme. La première est le manque flagrant de gouvernance de ce programme. Entendant par là, une gestion administrative du projet nourrie par une bureaucratie excessive sans aucune prise avec le terrain et la réalité. Le suivi et l’application de ce Plan auraient du être donnés à une structure indépendante, supraministérielle, relevant de la plus haute autorité de l’Etat.

La deuxième raison de l’échec de ce plan, aussi paradoxale que cela puisse paraître, est le déficit en communication et en concertation entre ceux qui en avaient la charge. Largement sollicités lors de sa rédaction mais largement ignorés lorsqu’il fallait passer à l’action. Avec le temps, les retards se sont accumulés et notre pays ne bénéficie pas, ou très peu, de tout ce que les TIC offrent comme moyens de développement. La création du Fonds spécial de soutien aux T.I.C (FAUDTIC), la mise en place du contrat de Partenariat Public/Privé (Rarement appliqué notamment par Algérie Télécom qui continue à se comporter comme une administration) du réseau National de la recherche dans les TIC (2RSTIC), la mise en opération du Cyberparc de Sidi Abdallah, qui ont été lancés par les autorités du secteur des TIC, sont autant de signes d’un sursaut et vont dans le bon sens. Mais ils ne sont pas suffisants vu la déliquescence qui a prévalu dans ce secteur depuis si longtemps.

Le projet Ousratic 2 était supposé apporter de meilleurs résultats que l’ancienne version. Que pouvez-vous nous dire à ce propos ?

Voilà un moment que je ne rencontre plus ce mot dans la presse. Je l’ai «googlé » pour réveiller ma mémoire. Je vous invite à tenter l’expérience. Cette visite, seule, résume l’état actuel de nos TIC : la stagnation et la panne d’idées. Son site, www.ousratic.dz, a une page d’accueil avec un menu à une seule entrée cliquable mais récursive « Accueil » qui vous permettra de « rafraîchir » la page d’accueil à l’infini, mais malheureusement pas « Ousratic» lui même ! Vous pourrez découvrir que ce site vient de souffler sa sixième bougie. Mais en fait, je n’apprends rien et encore moins qu’il existerait un « Ousratic 2», objet de votre question. C’est vrai que le site m’apprend que je suis le 181.047 ème visiteur. C’est dire sa popularité sur les 6 millions de foyers qui étaient supposés s’en pourvoir avant 2010 (il faut rappeler que cette déclaration engagement avait été faite en 2005 par le premier Magistrat du Pays au SMSI de Tunis devant plus de 80 Chefs d’Etat).

Sous d’autres cieux, on renouvelle une expérience en l’affublant fièrement d’un « 2 » lorsqu’elle celle-ci a réussi et qu’on veuille capitaliser sur ce succès pour engranger encore plus de dividendes. D’autre part, la LFC 2009 et ses compléments sont venus compliquer un peu plus les choses. Elle a éliminé purement et simplement le crédit à la consommation pour le citoyen. Elle a aussi lourdement entravé l’acquisition des intrants pour les opérateurs des TIC avec des procédures d’importations et d’homologation des équipements à ne plus en finir. Reconnaître l’échec d’une opération nous grandit et nous permet d’avancer. Développons des services en ligne pour le citoyen, donnons lui le moyen de bien se connecter à Internet. Il ira lui-même chercher le moyen d’en profiter une fois que le besoin sera là. Seule la loi universelle de l’offre et de la demande est applicable.

Quelle est votre lecture en ce qui concerne les retards accusés dernièrement dans la généralisation de la 3G ?

En mai 2010, il avait été décidé de lancer un appel d’offres pour l’octroi de la licence 4G à la fin de l’année 2010 avec la possibilité d’ouverture vers un quatrième opérateur. Oui, vous avez bien lu, 4G. Une année après, on annonce le lancement du cahier des charges de la… 3 G pour la fin 2011, avec une mise en service prévue pour début 2012, c’est à dire dans un peu plus d’un mois. L’appel d’offres de la 3G a bien été lancé cette fois-ci. Mais, il se trouve qu’il a été retiré sans qu’on sache trop pourquoi. Fait-on du sur place ? Oui, mais, en plus à reculons. La 3G existe et a été adoptée par de nombreux pays depuis longtemps déjà. Certains de nos voisins l’ont et se préparent sérieusement à la 4G qu’ils prévoient, pour certains, pour 2012 c’est à dire dans quelques mois. Autrement dit, la 3G est en fin de vie et même obsolète par rapport à l’échelle de l’évolution des technologies. Nous pensons qu’aller vers la 4G tombe dans le sens pour au moins quatre raisons. D’abord pour éviter l’obsolescence de la 3G, une technologie qui date des années 2000. Ensuite, nous profiterons du saut technologique qui rendra possible le Haut Débit Mobile.

La troisième raison et pas la moindre, les trois opérateurs seront au même niveau, alors qu’ils ne le sont pas du tout avec le lancement de la 3G. En effet, selon leurs propres déclarations, Nedjma est prête à 100% et pourra démarrer la 3G dès demain si elle avait la Licence. Djezzy, lui, est prêt à 70-80% et pourra rattraper son retard assez rapidement alors que Mobilis n’est tout simplement pas prêt. Ce dernier, compte tenu des procédures bureaucratiques, aurait besoin de deux ans au minimum pour l’être. La quatrième et dernière raison est que la 4G permettrait la prise en charge de tellement de services à valeurs ajoutées et de développement de contenu que le coût des investissements de départ pourrait être rapidement amorti par la mise en place de partenariats avec des opérateurs virtuels (MVNO : Mobile Virtual Network Operator). En choisissant tout de suite la 4G, les trois opérateurs seraient alors presque au même niveau d’investissement, si les contraintes bureaucratiques sont levées pour Mobilis et Algérie Télécom. Seuls compteront alors les compétences, les services offerts et leur qualité pour le bonheur du citoyen qui n’aura que l’embarras du choix. Ne pourrions-nous pas saisir cette belle occasion pour marquer une courte pause et mettre en place une équipe de professionnels et experts du secteur public et privé, pilotée par le MPTIC pour étudier et proposer la meilleure solution possible pour notre pays ?

Quelle est la situation d’Internet et des télécoms en Algérie ?

J’ai deux points de vue concernant cette question. Je commence par la moins valorisante pour nous. Si l’on croit les statistiques de l’UIT (Union International des Télécommunications), de la Banque Mondiale ainsi que les classements des différents Observatoires des TIC à l’échelle mondiale, nous sommes parmi les derniers dans toutes les matières et, pire encore, nous doublons et redoublons en aggravant notre score, d’année en année, pour nous rapprocher encore plus du dernier du classement! Le point valorisant est que de « source généralement bien informée », bien de chez nous, on m’affirme que ces instances internationales n’ont pas les « bons chiffres ». C’est pour cela que nous sommes mal classés. Bien sûr que ce dernier point est très proche de la vérité. C’est pour nous punir de ne pas leur avoir donné « les bons chiffres » que ces instances internationales nous classent avec autant de malveillance. Elles nous casent parmi les derniers, cohabitant avec la Somalie et autre Azerbaijan. Pour éviter ce classement « d’office » de l’Algérie qui nous a pénalisé depuis si longtemps, n’est-il pas possible d’instruire et d’outiller soit l’ONS (Office National des Statistiques) soit l’ARPT (Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications), soit le MPTIC, ou tout simplement les trois, qui, dans un cadre fiable et concerté, produiraient, compileraient, consolideraient et valideraient les données pour fournir la plus fidèle et la plus valorisante des images de notre pays ?


E-commerce au Maroc : UNE PROGRESSION RAPIDE


Maroc e-commerce Expo 2011 est le nom de la première édition d’un salon entièrement dédié au commerce électronique tenu du 3 au 5 novembre 2011. Cet événement a été une opportunité pour l’équipe de N’TIC Magazine qui a fait le déplacement de savoir où en étaient les choses chez nos voisins et pour connaître l’écart qui sépare le Maroc de l’Algérie dans ce domaine, notre pays n’ayant toujours pas franchi le pas du e-commerce. Durant le deuxième trimestre de l’ année 2011, le e-commerce a connu une croissance de 43%. Le Maroc, qui connaît une progression rapide dans ce domaine, compte actuellement sept millions de cartes de paiement électronique.

L’on estime les transactions par cartes bancaires, effectuées durant le deuxième trimestre de l’ année 2011, à plus de 36 millions de dirhams. D’un autre côté, le nombre global de transactions effectuées par cartes aux por teurs marocains à l’intérieur du pays a augmenté de 25% durant la même période atteignant les 34 milliards de dirhams. En 2011, le paiement des créances par voie électronique est en première position avec une évolution se situant entre 40 et 45%, le shopping représente 20 à 30% des transactions, les voyages 20 à 26% et enfin tout ce qui touche au e-gouvernement avec une progression de 9%.

Ahmed GASMIA / N'TIC 60 - NOVEMBRE 2011