Les TIC et nos enfants : sommes-nous assez vigilants ?

Bien que l’utilisation des technologies de l’information et de la communication ne soit pas encore bien ancrée dans le système éducatif algérien, les enfants sont de plus en plus nombreux à s’intéresser aux nouvelles technologies. Les maîtrisant avec plus d’aisance que certains de leurs aînés, ces technologies ont bouleversé leurs vies. En bien ? En mal ? Enquête…



Le plaisir de toucher aux nouvelles technologies


La fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem) révélait, il y a quelques temps, que 77% des enfants algériens utilisaient Internet. Même si certains seraient tentés de contester ce taux, il n’en demeure pas moins que le nombre d’enfants algériens se connectant à Internet est manifestement en hausse. Cela dit, l’Algérie est l’un des pays où le taux de pénétration des nouvelles technologies comme outil pédagogique est le plus bas.

Malgré toutes les mesures prises par le gouvernement, peu d’écoles bénéficient d’une connexion internet et peu d’écoles enseignent l’informatique à ses élèves. Et pourtant, Internet progresse chez nous et compte parmi ses utilisateurs un contingent d’enfants, parfois en bas âge, aux côtés de préadolescents déjà très « branchés ». Ceux qui n’ont pas la chance d’avoir la connexion chez eux se familiarisent comme ils le peuvent avec l’ordinateur dans les cybercafés notamment. Ces points de connexion sont devenus pour eux essentiellement des terrains de jeu et accessoirement une source d’information pour leurs exposés.

Ils  se connectent donc pour jouer, en premier lieu, pour trouver des réponses à des interrogations directement en rapport avec leurs programmes scolaires, ou encore seulement pour le plaisir de toucher aux nouvelles technologies. Internet, source d’information intarissable, a complètement transformé les habitudes des petits écoliers. Ces derniers ne semblent désormais plus concevoir la préparation d’un devoir ou la rédaction d’un exposé sans se référer au réseau mondial. L’accès rapide à une information récente, la possibilité de faire des recoupements entre des données récoltées à partir de plusieurs sources, Internet est désormais la référence pour les écoliers. Ces derniers sont bien souvent encouragés par les adultes, parents ou enseignants, à utiliser cette technologie qui n’a presque plus de secrets pour eux.

Mais Internet et l’outil informatique ne représentent vraisemblablement pas les seuls centres d’intérêt des enfants en ce qui concerne les TIC. Il ne faut pas oublier le téléphone portable qui est devenu, sans nul doute, l’un des jouets favoris de beaucoup d’enfants, notamment les préadolescents. Il est un objet familier qu’on exhibe et qu’on compare, et il est devenu quasi impossible de se séparer de ce petit joujou. « Ma fille âgée de seulement 14 ans ne peut se séparer de son téléphone. Elle se lève avec, mange avec, dort avec ! Elle passe ses journées à tapoter sur son clavier. Cela m’inquiète beaucoup », nous a confié une mère de famille. Et elle n’est pas la seule à être dans ce cas.
 
Le nombre d’enfants ayant accès aux nouvelles technologies va indubitablement augmenter. Outre l’intérêt porté naturellement par les plus jeunes aux TIC, cette progression devra être aussi le résultat de projets à lancer par les autorités avec pour objectif de développer l’usage d’Internet et de l’outil informatique. La généralisation des nouvelles technologies au niveau des établissements scolaires figure, en effet, parmi les objectifs du ministère de la poste et des nouvelles technologies ainsi que celui de l’éducation. L’idée est de permettre à l’enfant d’utiliser régulièrement les nouvelles technologies dans le cadre de son programme éducatif.


La montée en puissance de Facebook fait peur…

Beaucoup de parents s’inquiètent aussi de la montée en puissance des réseaux sociaux, notamment de Facebook. Ce réseau est loin de rassurer les parents qui, il faut l’avouer, ne sont pas assez vigilants dans notre pays. Beaucoup d’entre eux s’inquiètent donc des conséquences de ce réseau social sur l’intimité et la santé psychologique de leurs enfants encore mineurs pour comprendre les enjeux de la vie virtuelle.

Des experts s'étaient réunis à Biskra pour avertir contre les « effets néfastes » de la démission des parents dans l’accompagnement des enfants utilisant les réseaux sociaux sur le Web. Pour les universitaires qui ont animé ce séminaire, " laisser des adolescents se connecter aux réseaux sociaux pendant des heures réduit leur interaction avec la famille et la société et refroidit leurs rapports avec les autres " en les " empêchant de partager les préoccupations et les tracas de ceux qui les entourent ".

En juin dernier, le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, avait annoncé la nouvelle sur la chaîne CNN : une version de Facebook pour les enfants de moins de 13 ans. « C’est une bataille que nous mènerons à un moment ou à un autre », déclarait-il en mai 2011. Ce qui n'était qu'un simple projet devrait devenir vite réalité puisque Facebook serait à deux doigts de lancer une version destinée à une toute nouvelle cible, les enfants de moins de 13 ans.

Pour ce faire, on parle de comptes des enfants qui seraient connectés à ceux des parents avec intégration d'outils permettant aux parents de décider avec qui leurs enfants peuvent devenir ami ainsi que les applications qu'ils peuvent utiliser.

Ce lancement pose déjà un sérieux problème auprès des défenseurs de la confidentialité. Mais M. Zuckerberg répond à toutes ces attaques en avançant un argument de taille. D'après lui, les enfants de moins de 13 ans utilisent déjà le réseau. Comment ? En mentant sur leur âge tout simplement. Il n'y aurait donc pas d'autre choix que de formaliser leur présence en établissant un certain nombre de contrôles.


Internet, un outil dangereux ?


Il est indéniable que les nouvelles technologies sont très bénéfiques mais leur abus, comme pour tout d’ailleurs, est susceptible de générer des risques sur la santé notamment celle des plus jeunes. En effet, l’utilisation exagérée d’Internet et des téléphones mobiles n’est pas sans conséquences sur la santé. D’après une étude menée dans la wilaya d’Oran, le nombre de cas d’amétropies (myopie, hypermétropie, astigmatisme) a connu, durant l’année 2010, une hausse de 14% en comparaison avec l’année 2009.

Dans cette même wilaya, 13 986 élèves présentant une baisse de l’acuité visuelle ont été dépistés durant l’année 2010 en raison essentiellement de l’utilisation abusive d’outils technologiques. Les médecins attirent donc l’attention des parents sur les risques qui guettent la santé de leurs enfants si leur utilisation des technologies n’est pas contrôlée. Certains enfants n’hésitent d’ailleurs pas à se connecter pendant des heures principalement pour jouer et aussi pour préparer leurs devoirs scolaires.


« Le risque sur la santé des enfants se conjugue désormais au quotidien d’autant plus que le nombre d’heures passées devant un ordinateur va toujours crescendo. Les enfants sont ainsi victimes de baisse de l’acuité visuelle, de mal de dos, de manque de sommeil et d’appétit pouvant avoir des retombées néfastes sur leur état de santé », précisent certains médecins.

Outre les risques encourus sur la santé, les nouvelles technologies, aussi utiles soient-elles, peuvent exposer ses plus jeunes utilisateurs à d’autres nombreux risques. Internet tout particulièrement est connu pour ces cas dits de « cybercriminalité ». Selon un rapport publié en 2010 par le Centre de recherche juridique et judiciaire algérien, « un enfant algérien sur trois a été victime de « cyber intimidation» sous une forme ou une autre » !

Outre le fait d’accéder à des sites aux contenus choquants, ces jeunes internautes font parfois de mauvaises rencontres sur le réseau et subissent des agressions virtuelles mais aux effets psychologiques bien réels, pour un bon nombre d’entre eux du moins. Le manque de vigilance de certains parents favorise l’augmentation des risques sur Internet. Afin de faire face à ce phénomène, des actions de sensibilisation en direction des parents ont été engagées par les autorités mais aussi par des acteurs du secteur des nouvelles technologies. La sensibilisation semble jusqu’à présent le meilleur moyen pour faire face aux dangers liés à Internet.

Mme Zohra Derdouri, ancienne présidente de l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPT) devenue Ministre de la Poste et des TIC, avait annoncé la mise en place d’une nouvelle politique visant la protection des biens et des personnes, la lutte contre la cybercriminalité et l’identification électronique. Selon elle, il est possible d’identifier les auteurs d’actes criminels sur Internet. Tout en avouant que les risques sur Internet ne peuvent pas être réduits à néant, elle fera remarquer qu’il est nécessaire de prendre les précautions adéquates pour atténuer ces risques.

Il semblerait toutefois que la lutte contre la cybercriminalité figure parmi les nouvelles priorités des autorités algériennes en général. Des rencontres exclusivement dédiées à cette question ont d’ailleurs déjà été organisées. Les cybercriminels, qui utilisent à chaque fois de nouvelles techniques, représentent une réelle menace pour les internautes de plus en plus nombreux en Algérie.