Algérie : le paysage audiovisuel a-t-il réellement changé ?

Depuis quelques mois, les Algériens assistent à une mutation de leur paysage audiovisuel. De nouvelles chaînes ont fait leur apparition. D’autres devront voir le jour au cours de cette année. Mais ces nouvelles télés sont-elles foncièrement différentes de l’ENTV ? Autrement dit, proposent-elles réellement une grille de programmes plus innovante que celle de la télévision publique ?


Pour de nombreux Algériens, les réponses à ces deux questions sont souvent négatives. Mis à part une certaine liberté de ton, les programmes proposés par ces nouvelles chaînes algériennes, mais qui diffusent à partir de l’étranger faute d’un arsenal juridique qui les autorise à le faire à partir de l’Algérie, n’ont rien d’alléchant.

En plus, force est de constater qu’au niveau de l’habillage graphique de ces chaînes, beaucoup reste encore à faire ! En effet, la charte graphique, les logos et les jingles qui personnalisent ces nouvelles télévisions témoignent encore d’un manque d’imagination.

Comparativement à leurs concurrentes moyenorientales ou maghrébines, les nouvelles télés algériennes demeurent primaires du point de vue de l’identité visuelle. Cette impression est éprouvée au quotidien par de nombreux téléspectateurs algériens.

Même en Libye, on fait mieux !

« Avoir de nouvelles chaînes de télévision est une bonne chose. Mais avoir de bonnes télévisions privées et indépendantes est loin d’être un objectif atteint en Algérie », estime à ce propos Mokrane, étudiant en sciences de l’information et de la communication à Alger. Notre jeune interlocuteur veut se spécialiser plus tard dans l’audiovisuel. Mais pour l’heure, le paysage médiatique algérien lui inspire de la frustration.

« Oui, c’est frustrant. En Libye, juste après la chute de la dictature de Kadhafi, de nouvelles télévisions ont fait leur apparition. Et leur contenu est plus intéressant que celui des télés algériennes. Quant à leur stratégie visuelle, elle est nettement plus moderne que celle de nos chaînes. Et pourtant, la Libye ne regorge pas de compétences comme l’Algérie », analyse-t-il.

Pour leur part, les spécialistes du secteur audiovisuel estiment qu’il est encore tôt pour pouvoir apprécier le travail de ces nouvelles télés. L’urgence aujourd’hui serait surtout de leur donner une base juridique en Algérie pour qu’elles puissent se développer sereinement. Sans un ancrage juridique en Algérie, ces nouvelles télévisions ne pourraient pas participer « à la construction d’une société démocratique plurielle, autour de valeurs partagées, pour une Algérie unie, puissante, ouverte sur le progrès, sans complexe ni faiblesse », a fait savoir récemment à ce sujet le producteur et réalisateur Boualem Aïssaoui.