Dans le microcosme vidéoludique de décembre...

A l’aube 2012, les plus pressés zieutent avec convoitise l’année qui se profile. Au feutre rouge, certains marquent des dates sur les calendriers qui sentent encore le plastique neuf. Février et son Final Fantasy XIII-2. Mars et son Mass Effect 3 talonné par un hypothétique Max Payne. La fin du monde serait pour décembre 2012, mais l’arrivée de Dragon’s Dogma et de DarkSiders II est prévue bien avant, voilà une consolation de taille pour le gamer apocalyptique. Au crépuscule 2011, les moins pressés ne décrochent pas les yeux de leur Skyrim encore rutilant, sauvage et inexploré. Skyrim, c’est le cinquième épisode des Elder Scrolls, et sujet même du test qui suit.

The Elder Scrolls V: Skyrim

Nous sommes en présence d’un jeu de rôle en vue subjective qui devrait servir d’exemple à citer face aux irréductibles qui boudent le jeu vidéo. Si le fado (chant portugais mélancolique) fait partie du patrimoine immatériel de l’Unesco, il n’y a alors aucune raison pour que Skyrim n’y figure pas ! Vous y incarnez un personnage que vous forgez non pas à travers un éditeur dédié, mais à travers vos propres actions. Comprenez par là que si vous passez votre temps à cueillir des herbes pour fabriquer des potions, vous apprendrez l’alchimie, si vous maniez l’arc, votre compétence d’archer s’améliorera par la pratique. Il ne suffit pas de remplir un questionnaire pour incarner le personnage que l’on veut, ce dernier est tel un costume sur mesure qui vient épouser vos contours les plus subtils.

Une architecture totalement ouverte

Une liberté totale vous est accordée dans Skyrim, tant sur le plan du gameplay que sur celui du déroulement de la trame. Un fil rouge commun à tous est bien évidemment présent pour donner du sens à l’histoire, mais votre expérience de jeu sera radicalement différente en fonction de votre rythme, des zones que vous décidez d’explorer, de l’ordre dans lequel vous abordez les quêtes secondaires…

Par exemple, vous tombez par hasard sur un collège de magie (dans une zone où vous vous rendez juste pour le plaisir de voir du pays, loin des objectifs suggérés par les PNJ). Vous pouvez alors vous inscrire pour devenir apprenti puis monter les échelons jusqu’au poste prestigieux d’archimage. Il vous faudra alors cinq bonnes heures pour venir à bout des quêtes du collège, toutes plus passionnantes les unes que les autres, à la réalisation impeccable dignes des plus belles sagas d’heroicfantasy, pour finalement vous rappeler que cela n’avait rien à voir avec la quête principale ! Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres pour illustrer la diversité affolante des situations que vous pouvez vivre dans le jeu.

Skyrim: venez comme vous êtes

Vous vous faites mordre par un vampire, vous pouvez en devenir un et profiter des bonus et malus de cette pathologie magique… comme vous pouvez ne jamais contracter la maladie durant tout le jeu. Vous sympathisez avec un personnage qui vous propose de se joindre à vous, alors vous pouvez avoir un compagnon d’armes des plus pratiques dans les donjons malfamés de Skyrim, comme vous pouvez faire le jeu sans jamais vous associer à personne. De caractère rentre-dedans? Spécialisez-vous dans le combat rapproché et faites de Skyrim un jeu de baston. Fan de jeu d’infiltration ? Tapissez-vous dans l’ombre et attaquez de manière furtive. Vous pourrez alors avoir un personnage taillé sur mesure pour l’infiltration, le vol d’objets, le crochetage de serrure, etc. Vous pouvez même vous marier et faire la cuisine pour votre bienaimé(e) !

Dans Skyrim, la situation géopolitique oppose l’Empire (autorité légitime dans plusieurs contrées du monde) à un groupe de révolutionnaires au meneur charismatique. Là où le jeu est bluffant, c’est qu’à aucun moment il ne tombe dans le manichéisme. Qui soutenir ? Les deux factions sont aussi légitimes l’une que l’autre, et leur évolution dans ce conflit n’est qu’un vaste arrière plan pour de petites histoires que vous allez vivre au gré de vos aventures, quelle vie ! Personne ne vous oblige à suivre un quelconque chemin, vous êtes jeté dans un monde gigantesque, peuplé de toutes sortes de populations, qu’il vous revient d’explorer et d’affecter comme bon vous semble. Justement, parlons-en, de ce monde.

Il est vivant !

Skyrim est le nom de la contrée dans lequel se déroulent les événements que vous allez vivre. Il s’agit clairement du plus beau RPG/FPS jamais réalisé. Hors de question de comparer la qualité de ses textures avec des FPS dont la durée de vie chatouille les 7 ou 8 heures vu que Skyrim vous offre une expérience de jeu qui ne plafonne même pas à 50 heures de jeu ! Là où la mâchoire du joueur tombe, ce n’est pas devant une finesse technique irréprochable, c’est devant une pâte artistique, un sens de la mise en scène, une crédibilité des situations comme je n’en ai jamais vécu dans un jeu vidéo.

Rentrez dans une taverne et écoutez le barde chanter quelques vers (vous pouvez aussi lui demander de vous fredonner un morceau particulier ou même devenir barde vous-même !), parlez au tenancier et glanez les dernières rumeurs du voisinage, regardez la fréquentation des lieux évoluer au cours de la journée, les va-et-vient, la lumière qui change du crépuscule à l’aube…Skyrim n’est pas statique, ce mouvement perpétuel vous plonge dans une fable fantastique aux mélodies que l’on n’oublie pas.

Image et son

La bande son justement est un bijou de justesse et d’adéquation avec le gameplay. Il faut les entendre, ces notes qui accompagnent vos pas dans les dédales désolés des catacombes… Ces compositions épiques qui vous mettent en alerte, qui par un reflexe pavlovien, vous font lever la caméra vers le ciel à la recherche d’un dragon venu vous échanger des politesses. Ces silences où l’on tend l’oreille… Est-ce un ogre qui grogne ? Deux bandits qui discutent ? Le bruit de l’eau qui coule vers les profondeurs de la grotte ? Un loup qui hurle pour ameuter ses camarades contre vous ? La majesté des compositions et associée à des bruitages exceptionnels, et pour la version américaine que nous avons testée, les doublages sont dignes d’un bon film.

Au loin le pic enneigé n’est pas un décor, il est un environnement que l’on peut visiter et où l’on trouvera certainement un ancien monastère à explorer, une mine de fer ou d’or à exploiter, un dragon à occire, un homicide à élucider…Dans les donjons, aucune redite, aucun copié/collé, voyager dans Skyrim est une expérience visuelle de tous les instants, variée et harmonieuse… Ne serait-ce pas le campement d’un géant et de son mammouth ? N’est-ce pas là le tombeau d’un ancien roi? Impossible de répertorier toutes les questions qui vous traverseront l’esprit.

Le mot de la fin

Ce zoom sur The Elder Scrolls V : Skyrim ne fait qu’égratigner la surface d’un soft à la richesse impossible à résumer en un seul article. Pour révéler le culte du détail qui a été nécessaire à l’élaboration du jeu, sachez que l’on peut y lire toute littérature qui tombe entre les mains de votre avatar, juste pour le plaisir de la lecture…des dizaines de fables et d’histoires en tout genre, ainsi que des livres sur l’histoire même du monde des Elder Scrolls jalonnent Skyrim. Ces heures de lecture ne servent à proprement parler nullement l’intrigue du jeu, mais elles sont un exemple de la profondeur abyssale d’un soft dont il reste à dire tellement, tellement de bien.

N'TIC 61 / ZIOUCHI Oussama